Qu’est ce qu’un savon à froid ?
Cet article fait partie d’un ensemble de 7 articles sur le savon écrits par 7 savonniers artisanaux travaillant suivant la méthode de saponification à froid. Pour chacun de nous, le savon est notre passion, notre métier, et au travers ces articles nous souhaitons vous le faire découvrir et apprécier. Aliona, artisan savonnière dans la Nièvre, répond ici à la question : qu’est ce qu’un savon à froid ? Bonne lecture 😉
Qu’est ce que le savon ?
Le savon est une réaction chimique entre un corps gras et un corps alcalin. Sur l’image ci-dessous on peut voir la réaction entre l’huile et la soude qui donnera du savon. Cette réaction s’appelle saponification. Après cette réaction nous obtiendrons du savon et de la glycérine (le rapport est à peu près de 90% de savon pour 10% de glycérine.
Les corps alcalins
Pour les savons durs on utilise de la soude caustique ou de la potasse pour les savons mous (comme le savon noir par exemple).
Les corps gras
La plupart du temps les savonniers adeptes de la méthode à froid sont des écolos convaincus (il y a toujours des exceptions à la règle), donc il est rare que l’on trouve des savons à froid avec de la graisse animale, mais si tout comme moi, vous ne supportez pas l’idée d’utiliser des savons à la graisse animale, vérifiez quand même l’étiquette : « Sodium Lardate » ou « Sodium Tallowate » correspondent au savon à la graisse de cochon ou de boeuf.
Alors quelles graisses utilise un savonnier pour ses savons à froid ?
Souvent l’huile de coco et d’olives sont présentes dans le savon à froid. Primo, ses huiles sont excellentes pour la peau et secundo, elles sont en quelque sorte complémentaires dans un savon : coco donne une bonne mousse, rend le savon assez dur, et l’olive qui adoucie le savon, rend la mousse plus pénétrante (je parle de sensation et non pas de pénétration dans la peau…).
La saponification à froid permet de surgraisser le savon : on met jusqu’à 10% de plus d’huile par rapport à la soude. Cette graisse libre fera tampon avec le chlore, permettra plus vite de rétablir la couche hydrolipidique de la peau (nous parlerons de cette couche un peu plus tard).
Pour le surgras on utilise les huiles dites « nobles », mais qui supportent la saponification et la chauffe (lors de la saponification le savon monte en température).
On peut utiliser les beurres de karité, cacao, buritti… de l’huile de chanvre, tamanu, argan, ricin, amande…Evidemment nous ne pouvons pas dire que ses 10% de surgras seront entièrement composés d’huiles précieuses. Cela dépendra beaucoup des insaponifiables que ces huiles contiendront.
Les insaponifiables
Les insaponifiables sont des molécules qui n’entreront pas en réaction avec la soude. Les insaponifiables qui nous intéressent sont ceux qui auront une action bénéfique sur la peau : améliorent l’élasticité de la peau, l’hydratent, la nourrissent, la protègent contre l’action néfaste du temps et du climat.
Parmi les insaponifiables nous pouvons citer les vitamines, les minéraux, les squalènes, les polyphénols, les phytostérols, les alcools gras…
Les actifs
On choisira les actifs également pour leurs actions sur la peau. On recherchera toujours : rendre la peau élastique, protégée, hydratée, détoxifiée, combler éventuellement les manques en oligoéléments et en vitamines.
Pour affirmer que tel ou tel savon puisse faire tout, ou en partie, il faudrait faire des tests. Mais en même temps on sait qu’on peut plus rapidement combler les manques des certains aliments par la peau (à travers les bains, les cataplasmes, les frictions, etc.) que par la prise in vitro de compléments alimentaires.
La peau a la propriété d’une éponge : elle absorbe les éléments qui sont mis en contact avec elle. Regardez à quelle vitesse elle absorbe les éléments d’un bracelet en cuivre ou des boucles d’oreilles en nickel… (vous observerez très rapidement une coloration de la peau à cet endroit). Sous l’effet de la chaleur (par exemple les douches et les bains très chauds) l’absorption se fait encore plus.

Savon à froid enrichi en beurre de karité façonné à la savonnerie BelleComme d’Aliona. Pour le côté gourmand, elle y met du chocolat 😉
Comme actifs on utilisera les argiles, le miel, les plantes, éventuellement les huiles essentielles. En ce qui concerne les huiles essentielles. Nous ne savons pas trop l’action de la soude sur les huiles essentielles. D’une manière générale les huiles essentielles sont mal étudiées, mais heureusement aussi l’intérêt pour les huiles est grandissant, donc peut-être qu’un jour il y aura des recherches qui nous éclairerons sur la réaction entre la soude et les huiles essentielles, et sur leurs éventuelles détériorations.
Un chimiste m’a affirmé que si l’odeur de l’huile essentielle est présente alors les molécules de l’huile essentielle seront là et auront une influence sur nous… C’est une déduction logique, mais sans études à l’appui.
Le parfum
Pour parfumer le savon nous utilisons les huiles essentielles ou bien les fragrances. Cela dépend de chaque savonnier. Chacun fait « sa petite cuisine » ))
La peau
La peau est un organe à part entière. Et c’est le plus grand organe de notre corps. La peau est un organe émonctoire, c. à d. qu’elle permet d’évacuer les déchets et les toxines (tout comme le foie et les reins). Donc il est important ne pas la surcharger en toxines (les produits cosmétiques non bio en contiennent une quantité monstre !).
La peau est fragilisée lors du lavage. Par action mécanique (le gant, la fleur de douche, le scrab…) et par action chimique les micelles (*) se lient avec une partie de la couche hydrolipidique de la peau pour l’enlever. La couche se détériore. Il faudra entre 20 minutes à huit heures pour que le corps puisse la restituer.
Cette couche joue le rôle important de protection contre le dessèchement, les UV et toutes autres agressions. Plus le temps de restituer cette couche est long, plus on s’approche d’une peau atopique (peau qui présente des dermatites, des allergies, l’eczéma, le psoriasis etc.). Pour maintenir la santé de notre peau il est très important de bien choisir les produits lavants.
(*) Micelles sont les molécules qui possèdent une tête polaire hydrophile et une chaine hydrophobe. C’est grâce à cette propriété que le savon lave.
Merci Aliona pour cet article très détaillé et joliment illustré ! Pour découvrir l’univers d’Aliona, je vous invite à vous rendre sur le site de sa savonnerie : www.bellecomme.com
Pour continuer votre découverte, je vous propose de continuer votre lecture avec les 6 autres questions auxquelles ont répondues les artisans savonniers :
- Qu’est ce qu’un savon à froid ?
- Comment un savonnier choisit il ses huiles ?
- Pourquoi votre peau aime les savons à froid ?
- Quel est l’impact d’un savon à froid sur l’environnement ?
- A quelle réglementation est soumis un savonnier ?
- Pourquoi opter pour un savon artisanal ?
- Comment reconnaître un savon à froid ?
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Vidéo – Qu’est ce que la saponification à froid ?
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